5 juin 2010

Jeune premier ?




Je n'ai jamais vraiment réussi à comprendre les jeunes Pu Er. On ne m'enlèvera pas de l'esprit qu'ils se ressemblent grosso-modo tous, ou tout au-moins, on retrouve chez eux systématiquement le même type d'odeur pouvant certes se décliner plus ou moins différemment mais dont la base aromatique ne diffère guère.

Je pense que beaucoup d'amateurs de Pu Er se forcent inconsciemment à les apprécier car ils n'ont pas d'autre alternative. Eh oui, dans le milieu, on passe vite pour un inculte, les apparences sont donc les bienvenues... Comme prétexte, ces derniers trouveront tous les arguments du monde (en premier lieu, le prix...) pour justifier leur précieuse acquisition. Et sans trop savoir pourquoi, ils s'époumoneront avec un fracassant "ce Pu Er est grandiooooose" !

A mon avis, un Pu Er reste ingrat au minimum 10 ans. Ingrat dans le sens imbuvable. Parmi toutes mes galettes récentes aucune ne m'a jamais convaincu. Bon, je vais bien réussir à y trouver tel ou tel parfum sympathique mais jamais, je n'ai ressenti un quelconque choc comme ce fut le cas avec certains Pu Er anciens ou Wulongs ou Sencha particulièrement remarquables.

Pour illustrer mon propos, j'ai ressorti le top du top, la Romanée Conti des Pu Er (*) servie dans la Rolls Royce de mes théières, celle que l'on sort rarement pour éviter de l'abîmer (**). Autant sortir le grand jeu, non ?!


Alors évidemment, le travail apporté à l'élaboration de cette galette est magnifique. Les énormes feuilles sont remarquablement belles (issues de théiers millénaires), le produit semble à la hauteur de sa réputation. Néanmoins, tout devient rapidement contradictoire dans le sens où la beauté du produit laisserait supposer un résultat exceptionnel riche en superlatifs, or, je me contenterais d'un "c'est sympa" ou d'un "mouais c'est pas mal".

On sent bien que ce thé en a sous le capot, il a du potentiel comme on dit dans ces cas-là (ah.... le fameux -potentiel-, il fallait que je le place celui-là, quel mot magique pour vendre du Pu Er à prix d'or !).

J'ai essayé d'aborder cette galette sous tous ses angles en évitant autant que possible de la comparer à certaines très belles références plus anciennes que j'apprécie particulièrement. Changer sa façon d'apprécier les Pu Er ou réviser son angle d'attaque pourraient être une piste intéressante à suivre dans sa manière d'appréhender les jeunes Pu Er. Mais il n'y a rien à faire, malgré tous mes efforts, je me retrouve confronté à cette éternelle odeur si caractéristique des jeunes Pu Er, celle qui m'a toujours tant importuné et gâché tout plaisir... Face à un tel chef d'oeuvre (du-moins sur le papier...), je me retrouve démuni d'argument pour l'apprécier à sa juste valeur.

Je ne comprendrai décidément jamais ces thés. J'y suis définitivement hermétique ou alors, je n'ai peut-être tout simplement aucun palais !! ;-)

Toutefois, je constate une chose : curieusement, après la raréfaction des Pu Er anciens, l'intérêt pour ces thés s'est subitement tari. Bizarrement, après un engouement démesuré, beaucoup se sont réorientés vers autre chose préférant dépenser les sous-sous dans l'achat de Wulongs ou de thés japonais. Ceci n'est sûrement pas sans raison...



(*) galette n°45 de 2005
(**) Yixing en terre épuisée de très belle facture